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L'Eclair et la Lanterne

Une étudiante de 40 ans à Paris qui aime écrire. Sauf mention contraire, toutes les photos sont de l'auteur.

Aujourd'hui sur le réseau

... routier, trois livreurs ont acheminé vers mon appartement le fameux batteur M****ex, qui n'a pas de look mais qui fonctionne très bien, quelques mois de ravitaillement en flocons de sarrasin, semoule de riz, purées d'oléagineux et autres produits sans gluten et sans lait, ainsi que mes courses de la semaine. Pour ce faire, ils ont bravé les embouteillages, les sens interdits et le harcèlement des traîne-savate qui s'agglutinent devant ma porte, venus se livrer à tout ce qu'on peut imaginer de louche dans le théâtre contigu à ma copropriété.

Ces joyeux drilles tentent plus souvent qu'à leur tour d'intercepter les colis qui me sont destinés ; certains disent que cela ressemble à un trafic de drogue, le genre qui court plutôt dans le 93. Vu l'herbe qui remonte en volutes par la colonne d'aération, je ne peux que leur donner raison.

Outre qu'ils sont bruyants, ils prétendent qu'ils mangent ou dorment chez moi, alors que je ne les connais ni d'Eve, ni d'Adam, qu'ils sont mal habillés et que certains sentent même mauvais. Aujourd'hui, ils m'ont faite imiter par plusieurs quinquagénaires venues exhiber leurs vieilles langues, leurs vieilles dents et leurs mammoplasties en geignant que je les embêtais.

Il faut dire que la prostitution, ce n'est pas non plus ma tasse de thé... Surtout quand on croit pouvoir se tirer d'affaire en utilisant mon nom et mon adresse : quelle immunité peut bien conférer ma pauvre identité à une bande organisée ? Il va falloir qu'on me l'explique, car je vis tout à fait normalement. Mais je suis peut-être la dernière propriétaire occupante dans le quartier ?

Si au moins, à défaut de commenter à tue-tête ce qu'ils pensent savoir de ma vie privée, ils pouvaient faire la queue de l'autre côté du trottoir... Ils feraient un petit pas vers le statut de bourgeois, qu'ils prétendent détester mais qu'en réalité ils envient. 

Il faut dire la drogue, c'est comme l'alcool : ça coûte cher. Et qu'à force, on balance des noms. Soit dit en passant, si quelqu'un a celui du nouveau gérant de ce f*** théâtre, qui lui-même a été renommé quatre fois en six ans, je suis preneuse.

En attendant, mangez plutôt des fruits, au lieu d'essayer de voler des cacahuètes : avec une bonne digestion, on y voit tout de suite plus clair !

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